Démarchage Téléphonique : Ce Que Pourrait Changer la Nouvelle Proposition de Loi
Anúncios
Le démarchage téléphonique, une pratique largement répandue et souvent perçue comme intrusive par de nombreux consommateurs, pourrait connaître une évolution majeure avec l’adoption imminente d’une proposition de loi.
Ce texte, faisant partie d’un cadre plus large de lutte contre les fraudes aux aides publiques, comprend une mesure clé visant à prohiber le démarchage téléphonique sans consentement.
Anúncios
Le vote final au Sénat est attendu ce mercredi 21 mai 2025 et pourrait marquer un tournant dans la manière dont les entreprises peuvent solliciter leurs clients par téléphone.
Le Contexte de la Proposition de Loi : Une Initiative Contre les Fraudes Aux Aides Publiques
La proposition de loi, portée par le député Thomas Cazenave du groupe Ensemble pour la République (EPR), vise avant tout à renforcer la lutte contre les fraudes liées aux dispositifs d’aides publiques, notamment dans le secteur de la rénovation énergétique (MaPrimeRénov’, certificats d’économies d’énergie, etc.).
Anúncios
Toutefois, un amendement ajouté lors des débats à l’Assemblée nationale a introduit une disposition allant au-delà de la lutte contre les fraudes : l’interdiction du démarchage téléphonique sans le consentement préalable des consommateurs.
Cette mesure repose sur une proposition antérieure du sénateur Pierre-Jean Verzelen, adoptée à l’unanimité par le Sénat en novembre 2024.
La particularité de cette nouvelle proposition est qu’elle bénéficie de la procédure accélérée, ce qui lui permet de passer rapidement devant les deux chambres pour une adoption définitive.
L’Interdiction du Démarchage Téléphonique Non Consenti : Un Changement Radical
Le cœur de cette mesure est simple mais fondamental : il deviendra interdit d’appeler une personne à des fins commerciales si celle-ci n’a pas donné son consentement explicite pour être démarchée.
Aujourd’hui, le système en vigueur repose sur un principe dit d’« opt-out », c’est-à-dire que le consommateur est présumé consentant par défaut et doit s’inscrire sur la liste Bloctel s’il souhaite ne plus être sollicité.
Cette liste bloque les appels commerciaux non désirés, mais son fonctionnement repose sur la démarche active du consommateur.
La nouvelle proposition de loi propose d’inverser cette logique en instaurant un système d’« opt-in » : les entreprises devront impérativement obtenir le consentement préalable du client avant de l’appeler.
En d’autres termes, la posture par défaut sera celle d’un refus à être démarché, et c’est au professionnel de prouver qu’il a recueilli l’accord.
Pierre-Jean Verzelen résume cette évolution ainsi : « Aujourd’hui, chaque Français est consentant par défaut pour être démarché.
Demain, ce sera l’inverse, chaque personne sera non consentante, sauf si elle manifeste son intérêt. »
Comparatif des Deux Systèmes : Opt-Out vs Opt-In
Aspect | Système Actuel (Opt-Out) | Nouveau Système Proposé (Opt-In) |
---|---|---|
Consentement initial | Consentement présumé (consommateur doit refuser) | Consentement explicite nécessaire |
Liste de refus | Bloctel | Disparition au profit d’un registre de consentement |
Charge de la preuve | Professionnel doit vérifier Bloctel | Professionnel doit prouver le consentement |
Liberté de prospection | Large, sauf inscription sur Bloctel | Restreinte, sans consentement pas de contact |
Protection du consommateur | Moyenne | Renforcée |
Sanctions Renforcées en Cas de Non-Respect
Le texte de loi prévoit également des sanctions significatives pour les entreprises qui ne respecteraient pas cette nouvelle règle.
L’amende pourrait atteindre jusqu’à 350 000 euros, un montant dissuasif destiné à protéger les consommateurs.
Dans les situations où le démarchage téléphonique s’accompagnerait d’un abus de faiblesse, notamment en ciblant des personnes vulnérables, la sanction pourrait atteindre jusqu’à 500 000 euros.
Ces dispositions témoignent de la volonté du législateur d’adresser fermement un problème perçu comme une nuisance majeure dans le quotidien de millions de Français.
Une Exception Importante : Le Contrat en Cours
Il est néanmoins important de souligner qu’une exception est prévue dans la loi.
L’interdiction ne s’applique pas lorsque la sollicitation téléphonique intervient dans le cadre de l’exécution d’un contrat en cours et que l’appel concerne l’objet même de ce contrat.
Cela signifie qu’une entreprise pourra toujours contacter ses clients pour des sujets directement liés à un service ou un produit déjà souscrit, par exemple pour des informations de facturation, un suivi de commande ou des propositions commerciales liées au contrat existant.
Cette dérogation vise à ne pas pénaliser la relation commerciale continue et à garantir un service client efficace.
Le Calendrier d’Entrée en Vigueur : Une Application Progressive
Si la proposition de loi est adoptée ce mercredi 21 mai, son application effective ne sera pas immédiate.
Selon Pierre-Jean Verzelen, la mise en œuvre du dispositif est prévue pour août 2026.
Ce délai d’un an et demi vise à permettre aux entreprises de s’adapter à ce nouveau cadre, de mettre en place les outils nécessaires pour recueillir et gérer le consentement des consommateurs, et aux autorités de préparer les modalités de contrôle et de sanction.
Cette période transitoire est également essentielle pour informer les citoyens de leurs nouveaux droits et pour les inciter à exprimer clairement leur volonté en matière de prospection téléphonique.
Un Tournant dans la Protection des Consommateurs
Cette réforme marque un tournant important dans la réglementation du démarchage téléphonique en France.
En passant d’un système passif où le consommateur devait s’inscrire pour ne plus être contacté, à un système actif où c’est le professionnel qui doit obtenir la permission, la protection des droits des individus est renforcée.
Cette nouvelle approche s’inscrit dans une tendance européenne plus large visant à renforcer la vie privée et à limiter les pratiques commerciales intrusives.
Par ailleurs, elle s’inscrit dans un contexte où les arnaques par téléphone, notamment dans le domaine des aides publiques et de la rénovation énergétique, ont suscité une forte inquiétude parmi la population.
Impacts Potentiels pour les Entreprises
Les professionnels du marketing téléphonique devront donc revoir leurs stratégies.
Le recueil du consentement préalable implique de nouvelles contraintes techniques et organisationnelles.
Les fichiers clients devront être mis à jour, les bases de données gérées avec rigueur pour prouver la conformité, et les équipes formées aux nouvelles règles.
Les campagnes de prospection par téléphone pourraient voir leur volume diminuer, ce qui incitera certains acteurs à privilégier d’autres canaux comme le numérique.
Cependant, cette réforme est perçue par beaucoup comme une opportunité de rétablir un dialogue commercial respectueux, basé sur un véritable intérêt des consommateurs.
Conclusion
L’adoption imminente de cette proposition de loi pourrait transformer durablement le paysage du démarchage téléphonique en France.
En instaurant le principe du consentement préalable, le législateur entend mettre fin à une pratique devenue pour beaucoup synonyme de harcèlement.
Ce changement, soutenu par le gouvernement et validé par une large majorité parlementaire, va dans le sens d’une plus grande protection des consommateurs face aux sollicitations commerciales.
Il reste désormais à observer la mise en œuvre concrète de ce dispositif, son efficacité réelle, ainsi que les adaptations des professionnels de la prospection.
Dans tous les cas, les Français auront bientôt un contrôle accru sur leurs données personnelles et une plus grande maîtrise de leur temps, libérés des appels non désirés.